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Michel Tournier ~ dez. 1924/jan. 2016 |
Este conto era estudado
em algumas escolas. Não sei
se continua a ser.
É uma belíssima narrativa
que remete para valores humanos
como a solidariedade, a
ternura, a alegria...
e para os afetos (escolho a
palavra, apesar
do grande vazio com que a
vestiram nos últimos tempos).
Ouvi agora que Michel
Tournier faleceu.
Logo me veio à memória este
conto,
e a obra Vendredi et la
vie sauvage.
Recordei-me igualmente
de ver o escritor no Porto, numa conferência em que revelou também um
grande poder de comunicação.
Nesse dia, explicou a razão
de, na publicidade aos relógios, os ponteiros mostrarem sempre as 10h10m - para
a imagem se aproximar de um sorriso!
De uma longa vida fica uma
vasta obra.
Como um relógio que mostra
muitas horas da vida humana.
"Le village
de Pouldreuzic allait-il connaître une période de paix? Depuis des
lustres, il était déchiré par l’opposition des cléricaux et des
radicaux, de l’école libre des Frères et de la communale laïque, du curé
et de l’instituteur. Les hostilités qui empruntaient les couleurs des
saisons viraient à l’enluminure légendaire avec les fêtes de fin
d’année. La messe de minuit avait lieu pour des raisons pratiques le 24
décembre à six heures du soir. A la même heure, l’instituteur, déguisé
en Père Noël, distribuait des jouets aux élèves de l’école laïque. Ainsi
le Père Noël devenait-il par ses soins un héros païen, radical et
anticlérical, et le curé lui opposait le Petit Jésus de sa crèche
vivante célèbre dans tout le canton comme on jette une ondée d’eau
bénite à la face du Diable.
Oui,
Pouldreuzic allait-il connaître une trêve? C’est que l’instituteur,
ayant pris sa retraite, avait été remplacé par une institutrice
étrangère au pays, et tout le monde l’observait pour savoir de quel bois
elle était faite. Mme Oiselin, mère de deux enfants dont un bébé de
trois mois était divorcée, ce qui paraissait un gage de fidélité laïque.
Mais le parti clérical triompha dès le premier dimanche, lorsqu’on vit
la nouvelle maîtresse faire une entrée remarquée à l’église.
Les dés
paraissaient jetés. Il n’y aurait plus d’arbre de Noël sacrilège à
l’heure de la messe de « minuit », et le curé resterait seul maître du
terrain. Aussi la surprise fut-elle grande quand Mme Oiselin annonça à
ses écoliers que rien ne serait changé à la tradition, et que le Père
Noël distribuerait ses cadeaux à l’heure habituelle. Quel jeu
jouait-elle? Et qui allait tenir le rôle du Père Noël? Le facteur et le
garde champêtre, auxquels tout le monde songeait en raison de leurs
opinions socialistes, affirmaient n’être au courant de rien.
L’étonnement fut à son comble quand on apprit que Mme Oiselin prêtait
son bébé au curé pour faire le Petit Jésus de sa crèche vivante.
Au début
tout alla bien. Le petit Oiselin dormait à poings fermés quand les
fidèles défilèrent devant la crèche, les yeux affûtés par la curiosité.
Le boeuf et l’âne un vrai boeuf, un vrai âne paraissaient attendris
devant le bébé laïque si miraculeusement métamorphosé en Sauveur.
Malheureusement
il commença à s’agiter dès l’Évangile, et ses hurlements éclatèrent au
moment où le curé montait en chaire. Jamais on n’avait entendu une voix
de bébé aussi éclatante. En vain la fillette qui jouait la Vierge Marie
le berça-t-elle contre sa maigre poitrine. Le marmot, rouge de colère,
trépignant des bras et des jambes, faisait retentir les voûtes de
l’église de ses cris furieux, et le curé ne pouvait placer un mot.
Finalement
il appela l’un des enfants de choeur et lui glissa un ordre à
l’oreille. Sans quitter son surplis, le jeune garçon sortit, et on
entendit le bruit de ses galoches décroître au-dehors.
Quelques
minutes plus tard, la moitié cléricale du village, tout entière réunie
dans la nef, eut une vision inouïe qui s’inscrivit à tout jamais dans la
légende dorée du Pays bigouden. On vit le Père Noël en personne faire
irruption dans l’église. Il se dirigea à grands pas vers la crèche. Puis
il écarta sa grande barbe de coton blanc, il déboutonna sa houppelande
rouge et tendit un sein généreux au Petit Jésus soudain apaisé".
La mère Noël - Michel Tournier (extrait de Coq de bruyère)